Gérard Masson, présidence sans détour

Après dix années à présider la Fédération Français Handisport et plus de 40 années au service du mouvement, il cède son poste de président le 8 avril. Le tennis de table, la Charente-Maritime, Jonzac, EDF, le CNOSF, Handisport… ses influences et ses engagements sont nombreux et ont façonné cet homme qui n’aime pas les détours pour faire avancer ce en quoi il croit et le partager. Rencontre avec Gérard Masson.


Gérard Masson, relayeur de la flamme olympique des Jeux de Londres 2012

On connaît le dirigeant, on connaît moins l’ancien sportif de haut-niveau…
Avant de m’investir à la fédération, j’ai été sportif de haut-niveau de 1968 à 1977, en tennis de table. J’ai adoré cette période, avec la fierté d’une médaille de bronze en individuel aux Jeux Mondiaux de 1975, et plus encore, l’or par équipe ! Il y a 40 ans les conditions étaient bien différentes, sans camera, ni partenaires. La reconnaissance du statut de sportif de haut-niveau pour les athlètes en situation de handicap a été une étape importante, même si cela ne suffit pas encore à rendre le quotidien plus facile, il faut toujours faire des sacrifices.

EDF a joué un rôle important dans ce parcours ? Avec handisport, c’est une troisième famille ?
Oui, c’est ma maison mère, j’y suis très attaché. EDF, ce sont des étapes merveilleuses de ma vie, associées à deux personnes principalement, le Président François Roussely tout d’abord et son Directeur de Cabinet, Cédric Lewandowski. Ce fut une étape professionnelle extraordinaire où j’ai pu avec eux, et grâce à eux, changer les craintes que pouvaient avoir des responsables EDF concernant l’embauche et le maintien à l’emploi des personnes en situation de handicap. OEuvrer à rendre accessible l’ensemble des sites qui accueillaient du public et mettre à la disposition de nos clients handicapés, principalement sensoriels, des outils pour devenir des clients et non des usagers, fut une mission aussi concrète que passionnante. Puis, je suis devenu dirigeant sportif, mis à disposition de la Fédération Handisport, salarié d’EDF et détaché à temps complet pour mes différentes fonctions, le rêve de tout dirigeant !

Avez-vous des instants particulièrement marquants, que vous n’oublierez pas, de ces dix années ?
J’ai eu la chance de vivre la progression extraordinaire de la médiatisation lors de grandes compétitions handisport et particulièrement autour des Jeux Paralympiques. Par rapport à 1975, quel bonheur de savoir que l’on partage ces images et les exploits de nos athlètes avec le plus grand nombre, de faire rêver des jeunes et moins jeunes en regardant nos sportifs exemplaires, sources d’inspiration pour beaucoup ! Le changement de logo fédéral a été marquant aussi, notre papillon qui déploie ses ailes, symbole d’autonomie, de liberté et d’épanouissement, le voir décliné partout, c’est une fierté, la marque de notre famille.

Des regrets ?
Je n’ai pas de regret. Je n’ai pas un tempérament à regarder le verre à demi vide. J’ai eu la chance d’être accompagné durant mon mandat par toute une équipe de collaborateurs ou collaboratrices qui n’avaient de cesse que d’avancer sans regarder derrière pour savoir si c’était mieux avant.

Le Mouvement handisport depuis 60 ans a connu de nombreuses transformations, mutation, révolution parfois. Est-on à une période charnière ?
Les virages sont toujours plus difficiles à maitriser que les lignes droites. Oui, nous sommes à une période charnière de l’histoire du Handisport où il va falloir « composer et partager », et là encore, chercher à aller de l’avant. Il faut admettre un monde qui change, qui évolue, même si ce n’est pas de la façon dont on l’imaginait. Il faut être positifs, constructifs afin de ne pas se faire imposer des choix.

Quels projets garderez-vous en mémoire de ces dix années de présidence ?
Beaucoup, car il y a eu énormément d’innovations pour nos pratiques. Le mot « développement » me vient tout de suite à l’esprit, à trois niveaux, celui du sport loisir, une composante essentielle de notre action, celui des sections handisport dans les clubs valides et enfin de nos pôles jeunes, où peuvent s’épanouir nos jeunes talents, avec des rêves de 2024 !

2024 justement, l’enjeu est important ?
En 2024, accueillir les Jeux Olympiques et Paralympiques à Paris et en France serait plus qu’une vitrine, mais un accélérateur extraordinaire pour faire entrer le sport dans le quotidien des personnes en situation de handicap, et adapter nos villes aux nécessités d’une société moderne et inclusive. Cette candidature nous oblige à passer à la vitesse supérieure : repenser la cité différemment pour qu’elle soit accessible et adaptée à tous, dans les transports, les services publics, les lieux culturels et les entreprises. Il faut revoir globalement notre approche entre sport et handicap, créer des synergies entre les clubs afin qu’ils soient davantage ouverts aux personnes en situation de handicap. Il est essentiel de favoriser les rencontres et les opportunités pour plus de mixité handi-valides, mener un véritable effort de formation pour la reconversion des athlètes handisport. Je veux saluer l’énergie et la ténacité des deux co-présidents, mes amis Bernard Lapasset et Tony Estanguet, qui n’ont qu’un objectif : gagner ! Il est déterminant que la France entière ait « envie des Jeux ».

Un conseil à donner à votre successeur ?
Ce sera le ou la sixième président(e) depuis la création de notre mouvement, la maison est saine, je suis confiant. Le conseil que je pourrai lui souffler en confiant les clefs serait ne pas trop regarder ce qu’on fait les prédécesseurs, d’aller de l’avant en suivant le chemin qu’il ou elle s’est tracé... 

« Nous sommes à une période charnière de l’histoire du handisport »
Propos recueillis par B.Hétet

Bio & repères

Gérard MASSON

Président de la Fédération Française Handisport, Cadre dirigeant EDF.

Officier de la Légion d’honneur, Commandeur du Mérite National, Médaillé d’Or de la Jeunesse et des Sports.

  • 69 ans, marié, 2 enfants. Paraplégique depuis accident en 1966.
  • 1968 – 1977 : Sportif de haut niveau en tennis de table
  • 1973 : Élu au Comité Directeur de la FFH, nommé Vice-Président
  • 1983 – 2001 : Directeur de Production chez ZODIAC International
  • 1995 – 2008 : Maire-adjoint de Jonzac (Charente-Maritime)
  • 2001 : Secrétaire général de la FFH
  • 2001 – 2015 : Membre des instances dirigeantes du Comité Paralympique Européen, de l’IPC et du CIO
  • 2001 – 2006 : Conseiller du Président d’EDF sur les questions liées au handicap
  • 2007 : Président de la FFH
  • 2009 – 2013 : Président du Comité Paralympique et Sportif Français
  • Chef des délégations françaises aux Jeux Paralympiques de Vancouver 2010, Londres 2012, Sotchi 2014.
  • Chef de mission à Atlanta 1996 et Sydney 2000.