La technologie au service du handisport

Ballon sonore pour les joueurs de cécifoot, fauteuil tout terrain pour les amateurs de randonnées, kartski pour les fondus de glisse, pied à restitution d’énergie pour les adeptes de course à pied, mentonnière pour les archers, fauteuils avec trois roues pour les athlètes… Les exemples sont nombreux… La technologie a permis d’améliorer les conditions de pratique sportive, en termes de sécurité et d’accessibilité, pour les personnes en situation de handicap. Si les progrès ont contribué à augmenter les performances, ils ont rendu accessible un grand nombre d’activités sportives, en loisir comme en compétition, aux personnes en situation de handicap. Peu importe les handicaps. Aux dires des spécialistes, cela va continuer, encore et encore. Tant mieux. Dossier réalisé par Julien Soyer

Les grandes évolutions

« Vous faites comme vous voulez, mais je veux pouvoir continuer à grimper des cols à vélo. » Dominique Fillonneau, l’un des deux orthopédistes fondateurs de la société Orthofiga, spécialisée dans le Grand Appareil Orthopédique (GAO), se souvient bien de cet amateur de cyclisme amputé tibial. Après une seconde amputation, du bras, cette fois, sa principale préoccupation était de pouvoir continuer à effectuer des sorties à vélo. « Depuis il a gravi mille cols avec son vélo. » Dans de nombreux cas, ce sont les patients, par leur volonté de pratiquer un sport bien particulier, qui sont à l’origine des avancées technologiques.

Sportifs de haut niveau ou non, ils vivent au quotidien avec leurs prothèses, orthèses ou fauteuils. Ils sont donc les mieux placés pour renvoyer des informations utiles.

Concernant les prothèses, notamment de membres inférieurs, elles sont souvent les points de départ des évolutions. « Il n’existe pas de Marcus Rehm ou d’Oscar Pistorius avec une orthèse », explique Dominique Fillonneau. « La prothèse est plus porteuse d’image quand l’orthèse est plus discrète et silencieuse. La prothèse touche davantage le grand public. Les progrès effectués sur les prothèses sont ensuite transférés sur les orthèses. »

Pour les membres inférieurs, dans les années 80-90, les pieds à restitution d’énergie et les premières lames en carbone ont révolutionné la pratique. « Elles ont permis aux patients de courir », commente l’orthopédiste. « Puis de réaliser des performances sportives impressionnantes. Le haut-niveau est un peu notre Formule 1 à nous. De la même manière que les 24 Heures du Mans ou la F 1 ont permis l’arrivée de l’ABS ou d’un grand nombre d’améliorations techniques, électroniques et technologiques dans la voiture de “Monsieur tout-le-monde”, les recherches, initiées pour permettre aux sportifs de haut niveau évoluant en handisport d’être toujours plus performants, servent ensuite le quotidien de toute personne en situation de handicap. Un exemple frappant : la technologie des carbones pré-imprégnés. » En effet, le carbone, par sa rigidité, sa souplesse et son poids, mais aussi par le côté nerveux du matériau, a apporté un vrai plus. L’autre révolution notable concerne la partie de la prothèse en contact avec la peau du patient. L’arrivée du silicone, de l’uréthane et du copolymère ont permis d’aborder la course sans se blesser. « Cette fois, nous avons d’abord pensé à la pratique de tout un chacun, pas forcément à celle des champions », précise Dominique Fillonneau. « Ces matières permettent aux manchons de ne plus glisser, de ne plus occasionner de frottement par rapport aux membres résiduels. Enfin, concernant les appareillages, l’apport fut très concret sur les pièces détachées devenues étanches. Cela permet aux patients d’aller à la piscine avec leur prothèse. Il est donc devenu naturel et commun qu’un patient se rende à la piscine ou en bord de mer avec sa prothèse. »

Avis d'expert

La coquille articulée a facilité la vie des skieurs alpins

Alain Marguerretaz, ancien skieur international handisport collabore depuis longtemps avec les fabricants de fauteuils de ski pour les faire évoluer, les rendre plus performants et plus sûrs. Il est également force de proposition.

« Avant, c’était impressionnant de prendre un télésiège avec un fauteuil de ski alpin » admet Alain Marguerretaz, 53 ans, « surtout en raison des systèmes d’accrochage et de décrochage à l’arrivée. » Paraplégique depuis l’âge de 23 ans, après une chute d’un pylône de télésiège alors qu’il travaillait comme saisonnier sur ces engins, ce médaillé paralympique de ski nordique a longtemps collaboré avec les fabricants de fauteuils de ski pour les tester afin de faire progresser la technologie et de développer la pratique pour le plus grand nombre.

Selon ce fondu de glisse, si de nombreuses évolutions ont touché les skis, leurs freins et les matériaux, l’une des principales évolutions touche le siège dans lequel s’installe le skieur. Conçu en une seule partie sur les premiers engins, le siège fut ensuite scindé en deux parties distinctes avec un siège articulé. 

« Nous sommes sanglés au dossier afin que celui-ci nous suive lorsque l’on se penche en avant », développe Alain Marguerretaz.

« Pour les paraplégiques, notamment, car plus le handicap est haut au niveau abdominal, plus on a besoin d’avoir une tenue de qualité. » Ces coquilles sont généralement fabriquées par des prothésistes.

L’apport du siège articulé se mesure lors des prises de télésiège. « Quand on en prend un, on se retrouve dans une position différente de celle dans laquelle on se trouve en skiant », poursuit l’ancien champion.
« On déverrouille le dossier pour être davantage en arrière car il faut être plus haut. Il a fallu que les skieurs assis s’adaptent aux remontées mécaniques et non l’inverse. » L’enjeu principal étant de ne plus arrêter le mécanisme pour permettre à une personne pratiquant dans un fauteuil de rejoindre le haut d’une piste. « La solution était de prendre le télésiège sous l’appareil. Il a donc fallu rendre l’amortisseur mobile afin de le déplacer de l’arrière vers l’avant. Grâce à ces évolutions, il n’est désormais plus nécessaire de stopper le télésiège. Le freiner suffit. »

Les fauteuils roulants ne sont pas en reste

Dix à quinze kilos. C’est le poids gagné entre les fauteuils roulants dédiés à la pratique sportive dans les années 70-80 et ceux d’aujourd’hui. L’arrivée de l’aluminium et du titane a tout changé. Jean-François Poitevin, ancien membre des équipes de France de basket, de tennis et d’athlétisme, a vu les engins se transformer avant de créer sa société et d’être partie prenante dans la réalisation de nouveaux fauteuils, toujours plus adaptés. « De 15-16 kilos, les fauteuils sont descendus à 5-6 kilos », affirme le directeur de la société Axess. « Certains châssis ne pèsent même que 2,2 kg. »

Outre le poids, de nombreux aménagements ont donné un autre visage aux fauteuils. En athlétisme, surtout, il y a eu l’apport de la troisième roue devant. Cela a suivi la mise en place d’un guide directionnel permettant de ne pas être emporté dans les dévers. « Sur piste on tourne plus souvent que l’on va droit », développe Jean-François Poitevin.

« Cette innovation a engendré une diminution des classes de handicap. » Les sièges ont été abaissés, il y a aussi eu un travail sur la main-courante afin que celle-ci soit boxée et non plus poussée. « Les gants ont changé pour s’adapter à cette nouvelle manière de faire avancer le fauteuil », précise l’entrepreneur.
Si tous ces aménagements, touchant les fauteuils d’athlétisme, n’ont qu’un intérêt sportif, d’autres apports ont davantage servi la masse. « Aujourd’hui, la petite roue installée derrière les fauteuils de tennis et de basket notamment, est devenue incontournable à haut niveau comme en loisir. Elle a même permis à des personnes en situation de grand handicap de pratiquer ces disciplines. Idem pour les sangles kick, similaires à celles utilisées pour tenir les chaussures de snowboard », détaille Jean François Poitevin.

La technologie et la sécurité à la montagne

Longtemps, trop longtemps, Anne, installée en Savoie non loin d’Annecy, a dû se résoudre à skier sans son fils aîné, Jean-Christophe, IMC et vivant dans un fauteuil électrique. « Quand il était petit, on l’emmenait avec nous dans un sac à dos, mais avec l’âge, c’est devenu impossible », raconte cette maman de deux garçons. « C’était un déchirement de ne pas pouvoir partir en famille sur les pistes. » L’horizon s’est dégagé grâce aux évolutions technologiques et à la création du tandemski. Davantage développé pour les personnes paraplégiques, Anne a vite adopté cet engin pour enfin s’adonner aux joies de la glisse avec Jean-Christophe, alors âgé de 18 ans.

La vie de cette famille fut transformée.
« On l’emmenait en totale autonomie car rapidement, je me suis donnée les moyens d’avoir un tandemski à la maison », explique Anne. « Comme tout le monde, lorsqu’il y avait de la neige et par beau temps, on pouvait décider d’aller skier avec toute la famille. » L’avantage dépasse la simple ouverture à une pratique sportive. « Cela crée un équilibre. Comme dans toutes les familles, il faut vivre de tels moments de partage, peu importe les loisirs, pour compenser les contraintes du quotidien. » En haut des pistes, la priorité n’est plus de penser aux soins, aux médicaments… Juste de glisser, de vivre des sensations fortes avec ses proches. Et de savourer le fait d’être autonome.

Sans oublier la sécurité

Anne, comme Romain, le frère de Jean-Christophe, ont passé la formation de guide en tandemski. Et chaque nouvel appareil est soumis à un contrôle. « Depuis 1998 en France, c’est unique dans le monde, une commission de sécurité a vu le jour. Elle comprend le ministère des transports, le domaine skiable de France (le syndicat des exploitants des remontées mécaniques) et la FFH », explique Pierre Tessier, à l’origine d’un grand nombre de nouveautés en matière de fauteuils de ski alpin. « Cette commission tripartite se réunit et homologue chaque nouveau fauteuil mis sur le marché. » Pierre Tessier a ajouté des freins sur les côtés du fauteuil. « Cela permet de freiner une chute quand le bolide se renverse sur le côté, sur une piste gelée », détaille le fabricant. « Une réflexion importante a été menée sur la cinématique de suspension et des amortissements afin de gagner en stabilité. Les sportifs vont de plus en plus vite et font des sauts de plus en plus impressionnants. »
Aujourd’hui, Pierre Tessier a même apporté un nouvel aménagement à son kartski, destiné aux personnes en situation de grand handicap parmi lesquelles les hémiplégiques. En ajoutant une barre sur l’engin, des amateurs comme Jean-Christophe peuvent s’attaquer, seuls, à des pistes vertes. « Cela change encore son regard et son approche » se réjouit sa mère. « Désormais, il ne veut plus faire que ça. »

Le dualski, quelquefois utilisé par les sportifs internationaux, a surtout convaincu les pratiquants loisir. « Imaginé en 1996, cet appareil offre la possibilité aux personnes paraplégiques de skier sur deux skis de façon sportive. Par sa meilleure stabilité et son accroche plus régulière, le dualski se révèle être plus sûr », développe Pierre Tessier. Ce dernier est allé encore plus loin. Il a sorti le Scarver, un fauteuil interchangeable.

« Un sportif passe ainsi de l’uniski au dualski en moins de cinq minutes. » Aujourd’hui, l’entreprise Tessier propose la gamme la plus large du monde et offre ainsi la possibilité à un grand nombre de personnes en situation de handicap, peu importe leur atteinte, de skier en toute sécurité et en toute autonomie. « À chaque fois, on se dit qu’il sera difficile de faire mieux, mais il trouve toujours ! », explique Emmanuel Senin, ancien skieur de haut-niveau et président de l’association Planète Handisport qui permet aux personnes en situation de handicap de s’adonner aux plaisirs de la glisse sur la neige et sur l’eau.

Le handbike, l'exemple frappant

Les exemples d’aménagements ouvrant le sport à tous les handicaps sont nombreux. Le ballon sonore a permis aux personnes déficientes visuelles ou aveugles de jouer au foot. Le handbike, lui, a ouvert de nouveaux horizons aux personnes à mobilité très réduite. « Il est très pratique et à la portée de tous », s’enthousiasme Alain Marguerretaz, ancien skieur de haut niveau, très impliqué dans la réflexion et les tests de nouveaux engins. « On peut en faire chez soi, quand on le souhaite. Contrairement au ski, tous les modèles conviennent et on s’y initie facilement. Il ne faut pas forcément un matériel parfaitement adapté. » Relancé par les Américains, le handbike répond complètement à une pratique sport-santé-loisir. « Pour nous, les personnes en fauteuil roulant, il permet de nous déplacer via un effort moins important grâce au développement des vitesses. Étant passé du fauteuil d’athlé au handbike, je l’ai bien mesuré. Le second nommé est très adapté aux balades en montagne et dans des sentiers pentus. » Les progrès ont été très rapides. Le poids est vite tombé et après avoir testé la position assise, comme dans un fauteuil, les fabricants ont fait en sorte que le cycliste se trouve plus bas avec les jambes allongées et une troisième roue devant.

Il existe aujourd’hui deux types de handbike. « Ceux en une pièce, adaptés à la pratique sportive. Et ceux pour lesquels il suffit de clipser la partie avant sur le fauteuil. Ces derniers répondent davantage aux cyclistes se déplaçant au quotidien par ce moyen de transport », juge Alain Marguerretaz. « Contrairement aux fauteuils d’athlé, on ne trouve pas de handbike ou de fauteuils de ski fins et très légers. La vitesse et les secousses, en alpin ou sur route, sollicitent beaucoup les châssis qui doivent donc être solides. »

     "Les progrès sont perpétuels. Et de nouveaux paliers devraient être franchis rapidement ”

Relancé par les Américains, le handbike répond parfaitement à une pratique sport-santé-loisir

Quand la technologie modifie l’activité

Le foot fauteuil électrique a connu un grand changement via l’arrivée d’un nouveau fauteuil appelé “strike force” (lire l’encadré page suivante). « Plus puissant, il permet de développer des schémas de jeu », explique Habd-Eddine Sebiane, joueur et président du club de Chatenay-Malabry. « Il a donné une dimension tactique à notre sport avec la possibilité de faire des appels en profondeur. Les manières de se déplacer aussi ont changé. Il est indispensable de posséder une bonne maîtrise technique. »

Pour sa part, le tir à l’arc est devenu accessible à davantage de personnes en situation de handicap grâce aux apports techniques et technologiques. Trois actions distinctes résument ce sport : tirer sur la corde, viser la cible et lâcher la corde. Les archers ont longtemps eu recours au “système D”. « Il y avait et il y a encore pas mal de bricolage », admet Vincent Hybois, directeur sportif du tir à l’arc à la FFH. « La technologie a ouvert notre activité. » De la potence placée devant le tireur en fauteuil, à celle uniquement tactile pour orienter le corps et la visée, au système électronique pour les personnes atteintes de déficience visuelle, en passant par la coque pour les personnes ne pouvant pas utiliser leur bras, les progrès ont été importants. « Je pense notamment à la mentonnière pour les archers ne pouvant pas déclencher la flèche avec le bras. » Les progrès sont perpétuels. Et de nouveaux paliers devraient être franchis rapidement. Au sujet des appareillages, « les centrales inertielles (ensemble de capteurs permettant de mesurer le mouvement), plus grosses qu’une clé de voiture il y a quatre ans et devenues plus petites que la moitié d’un timbre-poste, mesurent la pression, l’angulation, la vitesse, le déplacement et tout un tas de paramètres », développe Dominique Fillonneau, de la société Orthofiga. « Il peut situer un objet dans l’espace, dire quelle est sa position exacte et envoyer ces informations au pied ou au genou. » Ces technologies vont révolutionner l’appareillage. « Ce lien entre la commande nerveuse directe et la prothèse ne cesse d’évoluer. Il y aura des progrès importants à venir dans deux à cinq ans. Cependant, l’accès à ces moyens sera plus long. »

Le rôle important des associations

La généralisation des nouvelles technologies est parfois limitée par l’aspect financier. Les marchés sont tellement minimes qu’il est difficile pour les constructeurs de réduire les coûts. « Il existe sept tailles de sièges pour nos fauteuils », dévoile Pierre Tessier. « Certaines d’entre elles sont très peu vendues mais sont indispensables car elles concernent les enfants par exemple, déjà pas toujours bien servis. Certains modèles sont vendus à quinze exemplaires par an. On parle de best-sellers quand on sort une centaine de produits à l’année. » À raison de 4 500 € en moyenne par fauteuil de ski, il est donc important de pouvoir s’appuyer sur des associations.
« Nous avons créé la nôtre », témoignent Anne Thiébaut et Emmanuel Senin, respectivement à la tête de Live et Planète Handisport. « Cela permet à des personnes en situation de handicap de pratiquer leur sport sur un matériel fiable en qualité et en sécurité. »

Emmanuel Senin collabore d’ailleurs avec Pierre Tessier pour tester les fauteuils de wakeboard, probablement commercialisés cet été. « Les personnes en situation de handicap fans de ski nautique avaient souvent recours à la débrouille », selon Emmanuel Senin. Pierre Tessier s’est finalement jeté à l’eau pour imaginer un prototype. « Le problème du ski nautique réside en l’absence d’amortisseurs qui causait pas mal de secousses et de douleurs sur les tremplins », explique le président de l’association Planète Handisport. « Aujourd’hui, la souplesse de la planche créée par Pierre Tessier permet d’amortir les chocs car elle épouse davantage la vague. On y a gagné en confort, sans rien perdre du côté sensationnel. » En plus, les châssis en carbone et alu sont réglables et peuvent donc être utilisés par plusieurs personnes. « C’est important car cela permet aux clubs ou aux associations de s’en procurer pour leurs adhérents », apprécie Emmanuel Senin. Une condition sine qua none pour démocratiser la pratique. // J.Soyer

L'encadré
Le succès du strike force

Le strike force a révolutionné le foot fauteuil électrique. La raison : il a été dessiné par un joueur américain Eddy Mc Guire (photo) et conçu par la famille d’un autre joueur US.

Le point de détail crucial de ce fauteuil : le pare-chocs est plus long. En effet, un seul règlement est en vigueur en la matière : les roues avant doivent se situer à 33 cm des extrémités du pare-chocs, soit le diamètre du ballon. Sur le strike force, les roues ont donc été un peu reculées afin d’offrir davantage de surface de frappe pour le ballon. Ainsi, le pare-chocs est plus grand et composé d’un bloc unique.

Le strike force ne chavire pas

Installés dessus, les joueurs sont plus bas que dans les autres fauteuils spécifiques. Ce centre de gravité est notamment plus adapté lorsqu’un joueur frappe en rotation. Le dossier est également très reculé par rapport aux autres. « Cela donne donc du volume car ton corps accompagne davantage les rotations », explique Nicolas Dubès, ancien directeur sportif de la discipline à la FFH et aujourd’hui gérant de la société PikNik, le principal distributeur du fauteuil en France et en Europe.

Ce positionnement, situé sur l’axe de rotation des roues offre un autre atout. « Il permet d’avoir plus de visibilité et une meilleure stabilité. Le strike force ne chavire pas », développe Habd-Eddine Sebiane, joueur et président de Chatenay-Malabry. Plus résistant à la chaleur, doté de batteries plus performantes, le strike force se distingue aussi par un niveau de sensibilité encore jamais atteint par ses prédécesseurs. La fourche et les roues avant sont aussi plus grosses. Si le côté spectaculaire de la discipline a gagné grâce à ce fauteuil « made in US », Habd-Eddine Sebiane estime qu’actuellement les limites du raisonnable ont été atteintes en matière de puissance et de vitesse.

Entretien avec olivier ducruix

Ingénieur informaticien de formation, Olivier Ducruix travaille chez Orange comme responsable du centre de compétences en accessibilité numérique. Avec Mathieu Simonnet, président de l’association Orion,
qui permet à des personnes en situation de handicap visuel de naviguer, il a mis sur pied Sara : Sail And Race Audioguide. Une application que l’on peut qualifier de GPS des marins, disponible gratuitement sur l’Appstore. Orange étant partenaire du projet, Olivier Ducruix “coache” même des stagiaires de son service qui travaillent sur cette application afin de la faire évoluer et de la rendre encore plus performante et complète.

Comment est venue l’idée de créer Sara ?
Aujourd’hui pour faire de la voile en tant que malvoyant ou non-voyant, il n’y a pas grand-chose en France. C’est surtout sur le circuit international. Mathieu Simonnet, président de l’association Orion et qui travaille depuis quinze ans pour faire naviguer des personnes en situation de handicap visuel avec un maximum d’autonomie, a développé un prototype de Sara qu’il utilisait sur son bateau école dans le cadre de son association. Comme je suis allé effectuer plusieurs stages avec lui pour progresser dans la tactique de navigation à la voile, on a eu l’idée, il y a six ans, de développer une application sur smartphone qui permet aux gens de ne plus être obligés d’aller sur un bateau équipé d’un ordinateur, mais d’avoir leur application avec eux partout où ils vont. Cette application a pour but de booster cette pratique ou celle du match racing en France pour les personnes aveugles.

Comment fonctionne Sara ?
L’application fonctionne sur Iphone. On utilise le GPS de l’Iphone pour permettre à tout marin, et notamment à ceux en situation de handicap visuel, de naviguer en ayant des informations utiles pour manoeuvrer leur bateau. Ces infos arrivent de manière automatique et audio. Sara fournit au skipper des données comme son cap ou sa vitesse par exemple par une voix synthétique sans que le marin n’ait rien à faire.

C’est un peu le GPS de la voile…
Complètement. Ça peut servir à tout le monde parce qu’il n’y a rien à faire. Une fois l’application paramétrée, elle fait le reste. C’est forcément utile à des marins en situation de handicap visuel mais aussi pour les autres skippers qui veulent naviguer sans avoir les yeux fixés en permanence sur les outils de navigation.

Sara annonce aussi des obstacles (rochers, autres bateaux) présents ?
Non. Aujourd’hui, on est sur la régate. On peut utiliser Sara sans avoir défini un parcours. Dans ce cas-là, l’application indique le cap et la vitesse. Ou alors, et c’est le principal intérêt de Sara, on peut entrer un parcours de régate dans le logiciel : lignes de départ et d’arrivée, une succession de bouées à franchir… Sara gère tout : la procédure de départ en te situant toujours par rapport à la ligne de départ : si tu es dessous, dessus… Où se situe le bateau comité, la bouée qu’il faut laisser à babord… Quand tu as franchi la ligne de départ, elle active la bouée suivante pour te donner des informations telles que la distance à laquelle elle se trouve, son relèvement…

Aujourd’hui, l’application est lancée ?
L’application est disponible gratuitement sur l’Appstore mais on continue à la faire évoluer afin de la rendre encore plus performante. On est en cours de développement de nouvelles fonctionnalités. Il y aura une nouvelle version dans l’année, mais on peut déjà l’utiliser. Elle fonctionne parfaitement.

La prochaine grosse étape sera de mettre en place quelque chose pour la croisière ?
Exactement. On entend développer “Sara Croisière”. Cette application va reprendre la grande majorité des fonctionnalités de “Sara Régate” mais on y ajoutera le lien avec la cartographie : les balises, les dangers…

Est-ce complètement révolutionnaire pour la pratique de la voile parmi les personnes en situation de handicap visuel ?
Oui. À la fois en régate et encore plus si demain, on met ça en place pour la croisière. Avant Sara, la seule solution pour une personne étant atteinte de déficience visuelle était de régater via des bouées sonores, qui doivent par définition, être entendues de très loin. Cela provoque donc beaucoup de nuisance sur le plan d’eau et pour les autres usagers. Lors des grandes manifestations internationales, ça passe, mais pour s’entraîner, c’est juste impossible. À Lyon, je ne peux pas m’entraîner sur le lac du Grand Large, je vais embêter tout le monde. Sara permet donc de s’entraîner comme tout le monde avec des bouées standard et son Iphone. C’est beaucoup plus précis et pédagogique.

C’est-à-dire ?
Grâce aux informations de cap fournies par Sara, tu peux t’entraîner à la barre. Tu peux aussi, via la précision des données, mieux comprendre les stratégies de navigation : quand virer… Cela te permet aussi de comprendre la notion de vitesse efficace, appelée CMG en voile.