Adrien Corompt : Mécano, boulot, Rio !

Mécano, boulot… Rio ! 

Maillon méconnu de l’équipe de France de rugby fauteuil, le mécanicien est pourtant loin de jouer les seconds rôles dans la chaîne de compétences qui mène à la performance. Adrien Corompt est un expert qui maîtrise sur le bout des doigtsles machines dont il a la charge. Dans l’ombre, c’est à lui que revient la lourde responsabilité de mettre les joueurs dans des conditions optimales. Sans lui, ils seraient dans l’impossibilité de s’exprimer pleinement.

Les yeux des spectateurs sont rivés sur les joueurs. Sur le terrain, les fauteuils s’entrechoquent, mettant à rude épreuve le matériel. Sur le banc, Adrien Corompt est aux aguets. Il passe inaperçu pour la grande majorité, mais son rôle est pourtant capital. Le mécanicien de l’équipe de France est en efet un maillon essentiel de la chaîne de performance. Levé tôt, il est souvent le dernier à s’accorder une bonne nuit de sommeil réparateur.

Le sélectionneur national, Olivier Cusin, en est bien conscient «C’est un sport où la composante mécanique est très importante. Adrien fait un travail énorme. Les joueurs peuvent être les meilleurs du monde, si le matériel n’est pas à la hauteur, c’est peine perdue». Un travail énorme donc, et de précision. Si les crevaisons sont légion - elles se comptent souvent par dizaine l’espace d’un seul match - c’est sur les petites cassures que la diférence se fait. Commelors de ce match en Finlande, dans le cadre de l’Euro 2015. En entrant sur le terrain, Sébastien Lhuissier, l’un des attaquants tricolores, se retrouve à l’arrêt, la fourche d’une de ses roulettes anti-bascule vient de céder. Une cassure rare qu’il a fallu solutionner en quelques dizaines de secondes pour ne pas pénaliser toute l’équipe.

Une course contre la montre

Car le temps est compté. Le règlement est clair sur ce point. Nulle question de suspendre le cours du match indéiniment. En cas d’avarie, le mécanicien a une minute pour intervenir. Passé ce délai, le joueur concerné doit être remplacé, le temps d’opérer les réparations nécessaires.

Ce qui, dans certaines situations peut faire basculer le cours du jeu. «Si ça concerne un joueur essentiel de la Line up, à ce momentprécis du match, alors sa sortie peut déstabiliser tout le jeu mis en place», commente le sélectionneur national.

Alors, quand Olivier Cusin s’est penché sur l’avenir de son groupe au sortir des Jeux Paralympiques de Londres, sa rélexion a été globale. Atteindre le très haut niveau exigeait de s’attacher les services des meilleurs à tous les étages. Adrien donnait jusque-là un coup de main à l’équipe de France et au mécanicien sur les stages de préparation. Père de Christophe, membre de l’équipe national, ce routier à la retraite, s’est d’abord investi à Bourgoin, club de son ils. Après plusieurs années de bons et loyaux services, il est connu et reconnu pour son expertise. Sa place dans le staf national est alors toute trouvée.

Une aventure aux quatre coins du monde

Depuis 2013, il est donc sur le banc aux côtés des joueurs, de l’entraîneur et de Pasquale Gallo, le kinésithérapeute attitré des Bleus. Il est surtout très proche des joueurs avec lesquels il partage la culture de la gagne. Une belle aventure qui l’a déjà mené en Belgique, au Danemark, en Finlande, en République Tchèque où le groupe s’est ofert son premier titre international dans le cadre de l’Euro B, et en Grande-Bretagne. Trois championnats d’Europe et un Mondial ! Comme tous, son regard est désormais rivé sur les Jeux Paralympiques de Rio. Adrien prendra part à ses premiers Jeux. Il partage donc l’enthousiasme et le stress des joueurs et s’apprête comme à son habitude à vivre des journées marathon.

Rio en ligne de mire

Marteau, compresseur et clés en mains, il bichonnera, dès le réveil, les fauteuils des roues aux pare-chocs en passant par les roulettes anti-bascule, mais aussi les toiles d’assise. « C’est le B-A BA pour moi. Il faut vraiment porter une grande attention à l’assise des fauteuils pour le confort des joueurs » précise t-il. Sur le qui-vive durant tout le match il interviendra jusqu’à une vingtaine de fois,avant de remettre en état les machines pour aborder le match suivant. Alors que les joueurs seront couchés, il sera encore à la tâche. Une discipline à laquelle il s’astreindra durant tout le tournoi avant, il l’espère, de fêter de nouvelles victoires comme lors du Tournoi Qualiicatif Paralympique à Paris pour lesquelles ils ont tous énormément travaillé. // A. Daviré

Question / réponse

Quelles voies emprunter pour postuler à une sélection paralympique ?

Avant toute chose, le préalable est que le sportif soit impérativement licencié sur un plan national et international. Mais attention, une licence ne suit pas, il me semble également important que l’athlète adhèreà une association capable de l’accompagner sur un plan non seulement sportif, mais également partenarial. S’il veut se lancer dans un projet de performance ambitieux, cette prise en charge globale me paraît indispensable. Pour espérer se qualiier à une compétition du niveau des Jeux Paralympiques, qui représente l’excellencesportive, l’athlète doit s’entraîner de manière intensive, jusqu’à bi-quotidiennement, avec un entraîneur formé à la particularité de son handicap. Cela réclame un investissement quotidien sans faille et un mental d’acier. 

Par ailleurs, l’un des impératifs pour prendre part aux Jeux Paralympiques, est d’être avant tout éligible en matière de classiication. Selon les sports paralympiques, diférentes catégories de handicaps sont identiiées, le sportif doit disposer d’une classiication internationale conirmée par un panel de classiicateurs pour pouvoir prétendre à une qualiication aux Jeux Paralympiques. Le cas échéant, cette qualiication pourra éventuellement aboutir à une sélection. Mais un sportif n’arrive jamais aux Jeux Paralympiques par hasard et sans expérience. Il doit participer aux circuits de compétition tout d’abord régionaux mais aussi nationaux. Puis, si la possibilité lui est oferte, il prend alors part aux circuits de compétition internationaux de sa discipline. C’est un incontournable. C’est seulement alors, sil peut réaliser les minimas et/ ou entrer dans les critères de sélection déinis par les fédérations internationales pour les Jeux Paralympiques. qu’un sportif pourra espérer être sélectionné. Vous le voyez, pour un sportif, le chemin de sélection est long et difficile !

Par Pierrick Giraudeau DTN adjoint, en charge du haut-niveau