Canoë-kayak, l’évasion accessible

Des sièges confortables fabriqués par les constructeurs d’embarcations et d’autres bricolés en fonction des besoins des utilisateurs, aux pagaies adaptées en passant par un guidage sonore et des aménagements de ponton, l’éventail est très large. Le canoë-kayak permet au plus grand nombre de s’évader sur l’eau le temps d’une balade ou plus, en solo ou entre amis dans une embarcation monoplace, biplace…

« Si l’on m’avait dit quand j’étais en centre de rééducation : “dans quelques années, tu iras faire le lac de Chambéry avec des vagues de 50 cm tout seul dans ton kayak”, je n’y aurai pas cru ! » Pourtant, Olivier Nyffenegger, 44 ans et paraplégique depuis un accident de vélo survenu quand il avait 26 ans, l’a fait. Le canoë-kayak, ce père de trois enfants installé au Puy-en-Velay (Haute-Loire) l’a (re)découvert par hasard. « Un jour, j’ai reçu un mail de Romain Didio, conseiller technique fédéral handisport en Auvergne-Rhône Alpes. Il cherchait des personnes en situation de handicap pour une formation d’accompagnateur kayak. En résumé, on me proposait deux jours de kayak sur le lac d’Annecy. » Toujours attiré par la nature et par l’eau — « jeune et valide, je nageais beaucoup, j’ai aussi fait de la planche à voile » —, Olivier Nyffenegger se lance. C’était il y a quinze ans. Depuis, il est membre de la commission kayak de la FFH et contribue, avec, entre autres, Marie-Anne Tourault, Directrice Sportive de la commission et Romain Didio, au développement de l’activité.

Des aménagements pour une pratique autonome

Le développement a été favorisé par l’émergence d’adaptations et la création de matériel spécifique. « Le matériel est essentiel pour que le pratiquant soit acteur », situe Marie-Anne Tourault. « C’est ainsi qu’il va progresser, travailler sa gestuelle et sa glisse, se fixer des défis et performer, sans forcément parler de compétition. » Les premières innovations ont d’abord permis aux blessés médullaires de pratiquer. Via des calages en mousse et/ou, la mise en place de dossier, de butée pelvienne, puis avec l’apparition des coques. « J’ai commencé avec des calages en mousse », se souvient Olivier Nyffenegger, qui ne peut plus utiliser ses abdominaux et ses jambes. « Au bout de trois ans, j’ai essayé la coque, que l’on me recommandait depuis un moment. Depuis, je ne peux plus m’en passer. » Cette coque, dans laquelle il prend place, compense ces déficits musculaires. « Quand un valide tire sur la pagaie, ce sont les jambes et les abdos qui font la contre-poussée. Quand vous n’avez ni l’un ni l’autre, la contre-poussée se fait par son poids », explique-t-il. « Si on est bien calé, on perdra moins d’énergie en se tenant en équilibre et on en mettra davantage dans la propulsion du bateau. » La coque et les aménagements effectués lui permettent notamment de suivre ses amis. « Quand les aménagements sont bien adaptés, il n’y a plus de différence avec les valides. À niveau technique égal, on peut aller partout, le canoë-kayak est ainsi totalement inclusif. »

Conseiller et informer

Activité saisonnière par excellence, la commission fédérale et les comités territoriaux sont sollicités en quête d’un club en mesure d’accueillir une personne en situation de handicap. « L’existence de ce matériel est encore méconnue du grand public », reconnaît Marie-Anne Tourault. À l’image du cahier des experts dédié au matériel du canoë-kayak, la FFH recense et centralise les différentes innovations pour apporter des conseils aux clubs, aux comités et aux pratiquants individuels en quête d’informations.

“Le canoë-kayak est totalement inclusif.”

« De nombreux sportifs se tournent vers leur prothésiste ou leur ergothérapeute parce que les deux constructeurs français qui fabriquaient des coques ont arrêté en raison d’une trop faible demande. Nous indiquons aux personnes intéressées les clubs de la fédération homologue situés près de chez eux. » Il existe en effet un lien étroit entre la commission sportive de la FFH et la Fédération Française de Canoë-Kayak. « Nombreux sont les clubs prêts à accueillir des personnes en situation de handicap », assuret- elle. Afin de proposer une pratique de la discipline en toute sécurité, une formation au Certificat de Qualification Handisport (CQH) est proposée chaque année. Elle permet aux encadrants valides de se former à l’accueil de personnes en situation de handicap et connait d’ailleurs un succès régulier. Le matériel, dont l’objectif est de permettre à la personne de pratiquer de manière autonome, ouvre le champ des possibles. L’aménagement doit également répondre aux problématiques du handicap et de la sécurité. « On ne sangle jamais un sportif et tout doit être mis en place pour qu’il puisse s’extraire facilement et en toute autonomie de son embarcation en cas de dessalage. »

S’ouvrir aux handicaps des membres supérieurs

De nombreuses innovations sont à l’étude et des solutions sont proposées afin de permettre aux personnes ayant un handicap aux membres supérieurs de pratiquer. La pagaie béquille, pagaie plus légère, angle des pales différent, matériel d’aide à la préhension permettant de fixer la main sur la pagaie ou usage d’une potence… D’autres sont également proposées pour les déficients sensoriels : malentendant, sourds, malvoyants et non-voyants. Les déficients visuels peuvent se servir du système de guidage sonore utilisé en voile et/ou s’appuyer sur un guide. Les aménagements matériels offrent la possibilité au plus grand nombre de s’épanouir dans la pratique. Il faut aussi, notamment pour les personnes en fauteuil roulant, pouvoir accéder aux embarcations, depuis un ponton comme en bord de mer ou de rivière. La richesse du canoë-kayak est en effet de pouvoir sillonner mers, rivières, lacs ou marais, comme ce fut le cas lors de l’EDF ADN Tour Handisport. « Il existe les fauteuils “Hyppocampe” ou fauteuils de plage et des tapis pour accéder au bateau par la plage », cite en exemple Marie- Anne Tourault. Si les pontons peuvent faciliter l’accès aux embarcations, ils ne sont pas indispensables. « Parfois, certaines collectivités refusent de se lancer faute de pontons », argue la référente FFH. « Il faut conseiller les lieux les plus adaptés tels qu’ils sont. Les personnes doivent apprendre à embarquer sur des environnements instables, cela fait partie de l’apprentissage. » Un apprentissage qui sert le quotidien. « En termes d’équilibre et de transferts, le kayak m’a beaucoup aidé dans ma vie de tous les jours », corrobore Olivier Nyffenegger, ou comment joindre l’utile à l’agréable. // Julien Soyer

Références

Retrouvez toutes les publications du Pôle Expertise-Formation dans le centre ressources : ressources.handisport.org

Les cahiers des experts

La collection s’adresse à tous les encadrants, quel que soit le niveau de pratique du sportif et aborde différentes thématiques. Découvrez le dernier livret de la collection : le matériel de canoëkayak.
ressources.handisport.org

Les formations handisport

Développez vos compétences d’accompagnement et d’encadrement d’une personne en situation de handicap moteur et/ou sensoriel en toute sécurité grâce aux formations handisport. 
Plus d’infos : formation-handisport.org

Où pratiquer le canoë-kayak ?

Rendez-vous sur notre annuaire des clubs et comités, puis sélectionnez “canoë-kayak”.
annuaire.handisport.org